Au dialogue shangri-la, une grande muraille contre… la chine

Au dialogue shangri-la, une grande muraille contre… la chine

Play all audios:

Loading...

Pete Hegseth l’a promis : « Nous sommes là pour rester ». Samedi, le télégénique Secrétaire d’État à la défense américain a utilisé l’estrade du Shangri-La Dialogue (SLD), incontournable forum annuel sur la sécurité et la défense en Asie-Pacifique qui se tient à Singapour, pour chasser le spectre d’un désengagement de l’Amérique de la région. Mâchoire carrée, cheveux brillantinés, pochette aux couleurs de l’Amérique, son discours certes était en partie adressé outre-Pacifique à une audience de « taxpayer » (contribuables) américains. « Nous avons passé deux décennies à nous occuper des frontières des autres. Il est temps de protéger les nôtres » a-t-il martelé, évoquant « une invasion de 21 millions d’immigrés » de son pays. Pete Hegseth a aussi expliqué que les États-Unis étaient en train de reprendre le canal de Panama. « On l’a construit ! », a-t-il avancé. Mais il a consacré l’essentiel de son discours à réaffirmer la primauté de cette région pour l’Amérique, tentant de faire oublier la tentation de repli plusieurs fois affichée par Donald Trump. « L’Asie-Pacifique demeure notre théâtre d’opérations prioritaire », a-t-il assuré. Un son strident a dû résonner aux oreilles de Pékin. Depuis sa création, le SLD se distingue de tous les autres rendez-vous internationaux consacrés à la défense en ce qu’il réunit simultanément les plus hauts représentants de la Défense chinois et américains. Ils s’affrontent d’ordinaire à fleurets mouchetés. Cette fois, la Chine a snobé l’événement, laissant l’Amérique se déployer seule. Et triomphale. « Nous sommes là ce matin. Quelqu’un d’autre n’est pas là » a persiflé Pete Hegseth, visant « la Chine communiste ». Avant de lâcher ses coups. « La Chine veut être une puissance hégémonique. Elle emploie des tactiques grises et hybrides. Son comportement est un appel au sursaut » a-t-il asséné devant une audience muette d’attention de militaires en uniformes et de hauts fonctionnaires. Pete Hegseth a agité la menace d’une Chine « prête à envahir Taïwan dès 2027 ». « La menace est réelle. Elle pourrait être imminente », a-t-il averti. « Pete Hegseth a donné des assurances aux pays d’Asie sur la présence américaine. En cela, il a accompli sa mission. Son message était très clair. C’est positif pour la région », expliquait Mathieu Duchatel, directeur des études internationales de l’Institut Montaigne. Le ton de l’Américain était martial. Mais sur le fond, il ne différait pas vraiment de celui d’Emmanuel Macron la veille, qui, dans son discours inaugural, avait placé sur le même plan la situation de l’Ukraine et celle de Taïwan, soumis à la même menace de la part de puissances, russe et chinoise, alliées sur le terrain. Comme Pete Hegseth, la vice-présidente de la Commission Européenne Kaja Kallas sonnait le tocsin sur la même estrade lors de son discours. « Nous protestons quand les tensions montent dans le détroit de Taïwan et rejetons toute tentative de changer de manière unilatérale le statu quo, par la force ou l’intimidation ». Et de se montrer précise : « en 2023, un bateau battant pavillon chinois a laissé traîner son ancre sur 180 kilomètres dans la mer Baltique, endommageant des gazoducs et des câbles sous-marins. Au mieux une grave négligence, au pire du sabotage ». « Le PIB chinois a dépassé 70 % du PIB américain. La Chine a deux fois plus de capacités de production que l’Amérique. Elle domine la voiture électrique, le nucléaire de quatrième génération, elle a la marine la plus grande et une capacité navale plus grande que n’importe qui… À ce stade, nous devons collaborer avec les pays amis pour contrer l’influence chinoise », demande-t-elle. Dans les salles annexes et les couloirs de l’hôtel Shangri-La, les conciliabules entre délégations vont bon train. « Ça doit être l’événement le plus truffé de micros au monde », plaisante un délégué français. Retours d’expériences, présentation de matériel d’armement… et supputations. Exemple : l’avenir des forces armées américaines en Corée du Sud. Une élection présidentielle a lieu mardi qui portera au pouvoir, selon toute vraisemblance, Lee Jae-Myung, candidat de la gauche, après la destitution du président pro américain Yoon Suk-Yeol. Les États-Unis maintiennent un énorme contingent, de 28500 hommes, en Corée du Sud, pour protéger cette dernière du péril nord-coréen. Or le Wall Street Journal avance que l’administration Trump a prévu de réduire sa présence de 4500 hommes. Si elle est confirmée, cette réduction pourrait grandement bouleverser l’équilibre de la région. Autre sujet très commenté : le sort d’un avion militaire indien perdu lors d’un combat avec l’aviation pakistanaise dans la nuit du 6 ou 7 mai dans le contexte du conflit autour du Cachemire. La probabilité qu’il s’agisse, côté indien, d’un Rafale, abattu, côté pakistanais, par un missile chinois, alimente les conversations. Selon l’état-major français, l’incident a fait l’objet d’une campagne sur internet à partir de comptes chinois et pakistanais voulant dénigrer l’armement français et arguer de la supériorité de l’armement chinois sur celui de l’Hexagone. Air, terre, mer, et maintenant internet… Décidément, la guerre est désormais partout.

Pete Hegseth l’a promis : « Nous sommes là pour rester ». Samedi, le télégénique Secrétaire d’État à la défense américain a utilisé l’estrade du Shangri-La Dialogue (SLD), incontournable


forum annuel sur la sécurité et la défense en Asie-Pacifique qui se tient à Singapour, pour chasser le spectre d’un désengagement de l’Amérique de la région. Mâchoire carrée, cheveux


brillantinés, pochette aux couleurs de l’Amérique, son discours certes était en partie adressé outre-Pacifique à une audience de « taxpayer » (contribuables) américains. « Nous avons passé


deux décennies à nous occuper des frontières des autres. Il est temps de protéger les nôtres » a-t-il martelé, évoquant « une invasion de 21 millions d’immigrés » de son pays. Pete Hegseth a


aussi expliqué que les États-Unis étaient en train de reprendre le canal de Panama. « On l’a construit ! », a-t-il avancé. Mais il a consacré l’essentiel de son discours à réaffirmer la


primauté de cette région pour l’Amérique, tentant de faire oublier la tentation de repli plusieurs fois affichée par Donald Trump. « L’Asie-Pacifique demeure notre théâtre d’opérations


prioritaire », a-t-il assuré. Un son strident a dû résonner aux oreilles de Pékin. Depuis sa création, le SLD se distingue de tous les autres rendez-vous internationaux consacrés à la


défense en ce qu’il réunit simultanément les plus hauts représentants de la Défense chinois et américains. Ils s’affrontent d’ordinaire à fleurets mouchetés. Cette fois, la Chine a snobé


l’événement, laissant l’Amérique se déployer seule. Et triomphale. « Nous sommes là ce matin. Quelqu’un d’autre n’est pas là » a persiflé Pete Hegseth, visant « la Chine communiste ». Avant


de lâcher ses coups. « La Chine veut être une puissance hégémonique. Elle emploie des tactiques grises et hybrides. Son comportement est un appel au sursaut » a-t-il asséné devant une


audience muette d’attention de militaires en uniformes et de hauts fonctionnaires. Pete Hegseth a agité la menace d’une Chine « prête à envahir Taïwan dès 2027 ». « La menace est réelle.


Elle pourrait être imminente », a-t-il averti. « Pete Hegseth a donné des assurances aux pays d’Asie sur la présence américaine. En cela, il a accompli sa mission. Son message était très


clair. C’est positif pour la région », expliquait Mathieu Duchatel, directeur des études internationales de l’Institut Montaigne. Le ton de l’Américain était martial. Mais sur le fond, il ne


différait pas vraiment de celui d’Emmanuel Macron la veille, qui, dans son discours inaugural, avait placé sur le même plan la situation de l’Ukraine et celle de Taïwan, soumis à la même


menace de la part de puissances, russe et chinoise, alliées sur le terrain. Comme Pete Hegseth, la vice-présidente de la Commission Européenne Kaja Kallas sonnait le tocsin sur la même


estrade lors de son discours. « Nous protestons quand les tensions montent dans le détroit de Taïwan et rejetons toute tentative de changer de manière unilatérale le statu quo, par la force


ou l’intimidation ». Et de se montrer précise : « en 2023, un bateau battant pavillon chinois a laissé traîner son ancre sur 180 kilomètres dans la mer Baltique, endommageant des gazoducs et


des câbles sous-marins. Au mieux une grave négligence, au pire du sabotage ». « Le PIB chinois a dépassé 70 % du PIB américain. La Chine a deux fois plus de capacités de production que


l’Amérique. Elle domine la voiture électrique, le nucléaire de quatrième génération, elle a la marine la plus grande et une capacité navale plus grande que n’importe qui… À ce stade, nous


devons collaborer avec les pays amis pour contrer l’influence chinoise », demande-t-elle. Dans les salles annexes et les couloirs de l’hôtel Shangri-La, les conciliabules entre délégations


vont bon train. « Ça doit être l’événement le plus truffé de micros au monde », plaisante un délégué français. Retours d’expériences, présentation de matériel d’armement… et supputations.


Exemple : l’avenir des forces armées américaines en Corée du Sud. Une élection présidentielle a lieu mardi qui portera au pouvoir, selon toute vraisemblance, Lee Jae-Myung, candidat de la


gauche, après la destitution du président pro américain Yoon Suk-Yeol. Les États-Unis maintiennent un énorme contingent, de 28500 hommes, en Corée du Sud, pour protéger cette dernière du


péril nord-coréen. Or le Wall Street Journal avance que l’administration Trump a prévu de réduire sa présence de 4500 hommes. Si elle est confirmée, cette réduction pourrait grandement


bouleverser l’équilibre de la région. Autre sujet très commenté : le sort d’un avion militaire indien perdu lors d’un combat avec l’aviation pakistanaise dans la nuit du 6 ou 7 mai dans le


contexte du conflit autour du Cachemire. La probabilité qu’il s’agisse, côté indien, d’un Rafale, abattu, côté pakistanais, par un missile chinois, alimente les conversations. Selon


l’état-major français, l’incident a fait l’objet d’une campagne sur internet à partir de comptes chinois et pakistanais voulant dénigrer l’armement français et arguer de la supériorité de


l’armement chinois sur celui de l’Hexagone. Air, terre, mer, et maintenant internet… Décidément, la guerre est désormais partout.