Pape françois: retour sur son pontificat historique, mais controversé

Pape françois: retour sur son pontificat historique, mais controversé

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Le 13 mars 2013, Jorge Mario Bergoglio devint le 266e pape. Dès sa première salutation ce soir-là, une normalité remarquable. En disant seulement «_Buonasera_» («Bonsoir»), François a donné


un ton très différent à la papauté, privilégiant l’humilité à l’orgueil pour une Église catholique en proie aux scandales et aux accusations d’indifférence. Après cette nuit pluvieuse,


l’Argentin a apporté un vent de fraîcheur à une institution vieille de 2000 ans, dont l’influence avait décliné sous le mandat mouvementé du pape Benoît XVI, dont la démission surprise a


conduit à l’élection de François. À LIRE AUSSI Mais François a rapidement connu ses propres ennuis, et les conservateurs se sont de plus en plus indignés de son orientation progressiste, de


son engagement envers les catholiques LGBTQ+ et de sa répression contre les traditionalistes. Son plus grand défi a eu lieu en 2018, lorsqu’il a bâclé une affaire notoire d’abus sexuels


commis par un clergé au Chili, et le scandale qui avait envenimé la situation sous ses prédécesseurs a éclaté de nouveau sous sa direction. Et puis François, pape des périphéries, grand


voyageur et aimant les foules, a dû affronter la réalité inédite de la direction d’une religion universelle pendant la pandémie de coronavirus, depuis un Vatican confiné. > Il a imploré 


le monde de profiter de la COVID-19 pour repenser le > cadre économique et politique qui, selon lui, avait dressé les > riches contre les pauvres. «Nous avons réalisé que nous sommes


tous dans le même bateau, fragiles et désorientés», a déclaré François sur une place Saint-Pierre vide en mars 2020. Mais il a également souligné que la pandémie avait montré la nécessité de


«ramer tous ensemble, chacun ayant besoin de réconforter l’autre». RÉFORMER LE VATICAN François a été élu avec pour mandat de réformer la bureaucratie et les finances du Vatican, mais il


est allé plus loin en bouleversant l’Église sans en modifier la doctrine fondamentale. «Qui suis-je pour juger?» a-t-il répondu lorsqu’on l’a interrogé sur un prêtre prétendument homosexuel.


Ce commentaire adressait un message de bienvenue à la communauté LGBTQ+ et à ceux qui se sentaient rejetés par une Église qui avait privilégié la bienséance sexuelle à l’amour


inconditionnel. «Être homosexuel n’est pas un crime», a-t-il mentionné à l’Associated Press en 2023, appelant à l’abrogation des lois civiles qui le criminalisent. Insistant sur la


miséricorde, François a modifié la position de l’Église sur la peine de mort, la qualifiant d’inadmissible en toutes circonstances. Il a également déclaré que la possession d’armes


nucléaires, et pas seulement leur utilisation, était «immorale». Parmi d’autres premières, il a approuvé un accord avec la Chine sur les nominations d’évêques qui irritaient le Vatican


depuis des décennies, a rencontré le patriarche russe et a tracé de nouvelles relations avec le monde musulman en se rendant dans la péninsule arabique et en Irak. Il a réaffirmé le


sacerdoce exclusivement masculin et célibataire et a maintenu l’opposition de l’Église à l’avortement, le comparant à «l’embauche d’un tueur à gages pour résoudre un problème». RÔLE DES


FEMMES Il a ajouté des femmes à des rôles décisionnels importants et leur a permis de servir comme lectrices et acolytes dans les paroisses. Il a autorisé les femmes à voter aux côtés des


évêques lors des réunions périodiques du Vatican, à la suite de plaintes de longue date selon lesquelles les femmes effectuent une grande partie du travail de l’Église, mais sont exclues du


pouvoir. Sœur Nathalie Becquart, que François a nommée à l’un des plus hauts postes du Vatican, a souligné que son héritage était la vision d’une Église où les hommes et les femmes


cohabitent dans une relation de réciprocité et de respect. «Il s’agissait de transformer un modèle de domination — de l’être humain à la création, des hommes aux femmes — en un modèle de


coopération», a expliqué Mme Becquart, première femme à occuper un poste de vote dans un synode du Vatican. L’ÉGLISE COMME REFUGE Bien que François n’ait pas autorisé l’ordination des


femmes, la réforme du vote s’inscrivait dans un changement révolutionnaire en soulignant ce que l’Église devrait être: un refuge pour tous — «todos, todos, todos» («tout le monde, tout le


monde, tout le monde») — et non pour quelques privilégiés. > Les migrants, les pauvres, les prisonniers et les parias étaient > invités à sa table bien plus que les présidents ou les 


puissants. «Pour le pape François, il s’agissait toujours d’étendre les bras de l’Église pour accueillir tout le monde, et non pour exclure qui que ce soit», a rappelé le cardinal Kevin


Ferrell, le camerlingue du Vatican. François a exigé de ses évêques qu’ils fassent preuve de miséricorde et de charité envers leurs fidèles, a exhorté le monde à protéger la création divine


des catastrophes climatiques et a mis les pays au défi d’accueillir ceux qui fuyaient la guerre, la pauvreté et l’oppression. Si les progressistes se réjouissaient de l’accent mis par


François sur le message de miséricorde et d’inclusion de Jésus, cela inquiétait les conservateurs, qui craignaient qu’il n’édulcore l’enseignement catholique et ne menace l’identité


chrétienne même de l’Occident. Certains l’ont même qualifié d’hérétique. Quelques cardinaux l’ont ouvertement contesté. François répondait généralement par sa réponse habituelle aux


conflits: le silence. Il a facilité l’annulation du mariage pour les catholiques mariés, autorisé les prêtres à absoudre les femmes ayant avorté et décrété que les prêtres pouvaient bénir


les couples de même sexe. Il a amorcé le débat sur des questions comme l’homosexualité et le divorce, laissant aux pasteurs une marge de manœuvre pour discerner comment accompagner leurs


fidèles. SAINT FRANÇOIS D’ASSISE, MODÈLE François vivait à l’hôtel du Vatican plutôt qu’au Palais apostolique, portait ses vieilles chaussures orthopédiques et non les mocassins rouges de la


papauté, et se déplaçait en petites voitures. Comme si devenir le premier pape latino-américain et le premier pape jésuite ne suffisait pas, François fut aussi le premier à se nommer


d’après saint François d’Assise, ce frère du XIIIe siècle connu pour sa simplicité personnelle, son message de paix et son souci de la nature et des exclus de la société. François s’est


porté à la rencontre des chômeurs, des malades, des handicapés et des sans-abri. Il a présenté des excuses officielles aux peuples autochtones pour les crimes de l’Église depuis l’époque


coloniale. Et lui-même a souffert: il s’est fait retirer une partie du côlon en 2021, puis a dû subir une nouvelle intervention chirurgicale en 2023 pour réparer une hernie douloureuse et


retirer des tissus cicatriciels intestinaux. À partir de 2022, il a régulièrement utilisé un fauteuil roulant ou une canne en raison de problèmes de genoux, et a souffert de bronchites.


«Nous avons toujours été marginalisés, mais le pape François nous a toujours aidés», a déclaré Coqui Vargas, une femme transgenre dont la communauté romaine a noué une relation unique avec


François pendant la pandémie. SCANDALE DES ABUS SEXUELS Plus d’un an s’est écoulé avant que François ne rencontre des survivants d’abus sexuels commis par des prêtres, et les groupes de


victimes se sont d’abord demandé s’il comprenait vraiment l’ampleur du problème. François a bien créé une commission sur les abus sexuels pour conseiller l’Église sur les meilleures


pratiques, mais elle a perdu de son influence après quelques années et sa recommandation d’un tribunal pour juger les évêques qui couvraient des prêtres prédateurs n’a abouti à rien. Et puis


est survenue la plus grande crise de son pontificat, lorsqu’il a discrédité les victimes d’abus chiliennes en 2018 et a soutenu un évêque controversé lié à leur agresseur. Conscient de son


erreur, François convia les victimes au Vatican pour un mea culpa personnel et somma les dirigeants de l’Église chilienne de démissionner en bloc. À la fin de cette crise, une nouvelle


éclata autour de l’ancien cardinal Theodore McCarrick, archevêque de Washington à la retraite et conseiller de trois papes. François s’était empressé de mettre M. McCarrick sur la touche,


accusé d’avoir agressé sexuellement un enfant de chœur adolescent dans les années 1970. Pourtant, François fut accusé par l’ancien ambassadeur des États-Unis au Vatican d’avoir réhabilité M.


McCarrick au début de son pontificat. François finit par le défroquer après qu’une enquête du Vatican eut révélé qu’il avait abusé sexuellement d’adultes et de mineurs. Il modifia le droit


ecclésiastique afin de lever le secret pontifical entourant les cas d’abus et mit en place des procédures d’enquête sur les évêques qui abusaient ou couvraient leurs prêtres pédophiles,


cherchant ainsi à mettre fin à l’impunité de la hiérarchie. UN CHANGEMENT PAR RAPPORT À BENOÎT La décision du pape Benoît XVI de démissionner et de prendre sa retraite – la première en 600


ans – a ouvert la porte à l’élection de François, créant la réalité sans précédent de deux papes en vie au Vatican. > François n’a pas reculé devant l’ombre potentiellement > 


inconfortable de Benoît. Il l’a accueilli comme un homme > d’État et un conseiller expérimenté, le persuadant de sortir de > sa retraite cloîtrée pour participer à la vie publique de


> l’Église. «C’est comme avoir son grand-père à la maison, un grand-père sage», a souligné le pape François. François a loué Benoît en disant qu’il avait «ouvert la porte» à d’autres qui


lui emboîtaient le pas, alimentant les spéculations selon lesquelles François pourrait également prendre sa retraite. Mais après la mort de Benoît, le 31 décembre 2022, il a affirmé qu’en


principe, la papauté est un emploi à vie. LES CONSERVATEURS S’OPPOSENT À FRANÇOIS Les conservateurs se sont détournés de François, trahis après qu’il ait ouvert le débat sur l’autorisation


pour les catholiques remariés de recevoir les sacrements s’ils n’obtenaient pas une annulation – une décision de l’Église déclarant leur premier mariage invalide. «Nous n’aimons pas ce


pape», titrait le quotidien conservateur italien Il Foglio quelques mois après son accession au pontificat. Ces mêmes critiques ont intensifié leurs reproches après que François eut approuvé


la bénédiction pour les couples de même sexe et un accord controversé avec la Chine sur la nomination des évêques. Le cardinal américain Raymond Burke, figure de proue de l’opposition


anti-François, a fait valoir que l’Église était devenue «comme un navire sans gouvernail». À deux reprises, il s’est joint à d’autres cardinaux conservateurs pour demander officiellement à


François de s’expliquer sur des questions doctrinales reflétant une orientation plus progressiste, notamment sur la possibilité de bénédictions homosexuelles et son action auprès des


catholiques divorcés et remariés civilement. François a finalement sanctionné financièrement M. Burke, l’accusant de semer la «désunion». Cherchant à éliminer la corruption, François


supervisa la réforme de la banque du Vatican, entachée de scandales, et chercha à mettre les bureaucrates du Vatican au pas, limitant leurs rémunérations et leur capacité à recevoir des


cadeaux ou à attribuer des marchés publics. SOCCER, OPÉRA ET PRIÈRE Né le 17 décembre 1936 à Buenos Aires, Jorge Mario Bergoglio était l’aîné de cinq enfants d’immigrants italiens. Il


attribuait à sa grand-mère pieuse Rosa le mérite de lui avoir appris à prier. Il passait ses fins de semaine à écouter de l’opéra à la radio, à assister à la messe et aux matchs du club de


soccer familial, San Lorenzo. Il souffrit d’une pneumonie qui entraîna l’ablation de la partie supérieure de son poumon droit. Sa santé fragile l’empêcha de devenir missionnaire, et ses


capacités pulmonaires peu robustes étaient peut-être responsables de sa voix chuchotée et de sa réticence à chanter à la messe. Le 13 décembre 1969, il fut ordonné prêtre et commença


immédiatement à enseigner. En 1973, il fut nommé chef des jésuites en Argentine, une nomination qu’il reconnut plus tard comme «folle», étant donné qu’il n’avait que 36 ans. Il fut créé


cardinal en 2001. Il est passé tout près de devenir pape en 2005 lors de l’élection de Benoît XVI, obtenant le deuxième plus grand nombre de voix lors de plusieurs tours de scrutin avant de


se retirer. _La couverture religieuse de l’Associated Press est soutenue par la collaboration de l’AP avec The Conversation US, avec un financement de Lilly Endowment. L’AP est l’unique


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