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Publicité Commissions excessives, clauses abusives, liberté commerciale restreinte... Deux cabinets d'avocats veulent fédérer les hôteliers en France et en Espagne afin qu'ils
obtiennent réparation _«pour leurs pertes liées à des commissions excessives»_ de la plateforme Booking, a indiqué mardi l'un des avocats à l'initiative de cette action, Marc
Barennes. Pour lancer leur action, les cabinets Eskariam en Espagne et Geradin Partners à Paris s'appuient notamment sur une récente décision de la Cour de justice de l'Union
européenne, de septembre 2024, qui remet en cause les _«clauses de parité»_ imposées par Booking. Ces clauses sont des _«dispositions contractuelles qui empêchaient les hôtels et autres
hébergeurs de proposer des prix plus bas ou de meilleures conditions sur d'autres canaux de vente, restreignant ainsi leur liberté commerciale»_, indique un communiqué. Ils se réfèrent
également à des décisions des autorités de concurrence espagnole et italienne _«qui remettent en cause les pratiques illicites de Booking.com»_. «D_ES CENTAINES DE MILLIERS D’EUROS
D’INDEMNISATION»_ En France, un site internet (actioncollectivehotel.fr) propose de recueillir les données des hôteliers qui ont utilisé Booking entre 2015 et 2024 afin d'évaluer leur
préjudice potentiel, mettant en avant la perspective d'obtenir _«réparation pour les commissions excessives»_ versées à la plateforme néérlandaise, filiale du géant américain Priceline
Group. _«Les hôtels indépendants pourraient percevoir des dizaines, voire des centaines de milliers d'euros d'indemnisation. Pour les chaînes, les préjudices se chiffrent en
millions d'euros»_, peut-on lire sur ce site. Le cabinet d'avocats a fait évaluer les pertes totales des hôteliers liées à Booking en France à 1,5 milliard d'euros, selon Marc
Barennes. Dans le cadre de la législation sur les marchés numériques (DMA), Booking fait partie des géants de la _«tech»_ soumis dans l'Union européenne à de nouvelles règles de
concurrence plus strictes. La plateforme ne peut ainsi plus obliger les hôteliers européens à proposer leurs meilleurs prix sur son site. En outre, Marc Barennes souligne qu'étant un
acteur particulièrement scruté par la Commission européenne dans le cadre du DMA, Booking ne pourra pas se permettre de prendre des mesures de représailles contre les hôteliers décidant de
demander réparation. Les recours seront financés par une société de financement de litige qui se rémunèrera avec un pourcentage des indemnités obtenues en cas de victoire (entre 25 et 30%)
et les hôteliers n'auront donc rien à débourser, selon l'avocat. L’ITALIE ET LE PORTUGAL DANS LE VISEUR Des discussions sont en cours avec d'autres cabinets d'avocats
pour étendre l'initiative à d'autres pays, notamment l'Italie et le Portugal, _«dans le but d'élargir la couverture européenne et de construire un front juridique uni
contre Booking.com»_. En France, Marc Barennes souhaiterait pouvoir saisir le tribunal de commerce d'ici la fin du mois d'octobre. Si les organisations patronales de
l'hôtellerie ne disposent pas de statistiques officielles sur la part d'hôtels utilisant Booking en France, elles pointent régulièrement du doigt la domination de la plateforme en
matière de réservation hôtelière. En Europe, les réservations directement auprès de l'hôtel ne représentaient que 33% du chiffre d'affaires en ligne des hôtels en 2024, le reste
venant de plateformes comme Booking ou Expedia, selon les données de la société spécialisée en technologies hôtelières D-Edge. Et selon la plateforme de données Statista, Booking est la
plateforme la plus utilisée en France pour réserver un hôtel ou un logement touristique, devant Airbnb. Marc Barennes est par ailleurs à l'initiative d'une action similaire dans le
secteur de l'hôtellerie/restauration : celle opposant les restaurateurs aux émetteurs de titres-restaurant, sanctionnés pour pratiques anti-concurrentielles en France. 8000 points de
vente ont rejoint cette procédure annoncée en 2021, et retardée en raison de difficultés d'accès aux documents permettant d'évaluer le préjudice, des borderaux papier remontant à
plusieurs années, explique l'avocat qui mène cette action via sa société Brandeis Fiducie. _«On espère pouvoir déposer la demande d'indemnisation avant la fin de l'année»_,
précise-t-il.