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« _Tous mes engagements moraux et politiques me poussent à dire que la seule chose dont il convient de parler en ce moment, et face à un groupe aussi large, est une reconnaissance des
atrocités qui se produisent actuellement en Palestine. Le génocide est aujourd’hui soutenu politiquement et économiquement par les États-Unis, il est payé par nos taxes et est diffusé en
direct sur nos téléphones depuis les 18 derniers mois_ », prononce Logan Rozos, face à l’ensemble de sa communauté éducative et de sa promotion étudiante, le 14 mai dernier. En réaction, des
cris et des applaudissements de soutien retentissent dans la salle. Ce discours n’a pas plu à l’Université de New York qui décide de suspendre son diplôme et de poursuivre des sanctions
disciplinaires. Dans un communiqué officiel, l’administration s’exprime : « _L’université dénonce forcément le choix pris par un étudiant [...] d’exprimer ses opinions politiques,
personnelles et unilatérales._ » Loin d’avoir « abusé d’un privilège », Logan Rozos a surtout pris la parole dans un moment de tournant répressif extrêmement offensif de la part de
l’Université. CENSURE ET RÉPRESSION : UNE ORIENTATION DEPUIS LES MOUVEMENTS ÉTUDIANTS DU PRINTEMPS DERNIER C’est au cours du printemps 2024, alors que les universités se soulèvent partout
aux États Unis contre le génocide en Palestine que les mobilisations se déclenchent également sur plusieurs campus NYU. En réponse, l’administration avait appelé la police qui s’est déchaîné
brutalement contre les étudiants et a arrêté plus de 130 personnes. Plus de 5 000 étudiants et anciens étudiants avaient dénoncé ces pratiques de répression inédites, envoyant des lettres à
l’administration pour demander le retrait de la police de l’Université. C’est dans le sillage de ces mobilisations que l’été dernier, l’université a changé son règlement intérieur, avec la
mise en place d’un renforcement du contrôle des cours et des opinions politiques circulant sur le campus, avec l’inscription du mot « sionisme » dans le répertoire de discours
discriminatoires. Depuis ce moment charnière de répression physique par la police américaine sur les mobilisations dénonçant le génocide, la présidence tente aujourd’hui de réprimer les
opinions politiques directement au sein des salles de classe. En automne 2024, deux professeurs pro-Palestine sont virés et même bannis du campus. Une conférencière, travaillant sur les
coupes budgétaires de Trump visant la fondation d’aide au développement nationale USAID, a eu sa présentation annulée au motif que celle-ci serait trop critique de l’administration, et que
ses analyses de la famine à Gaza pourraient être perçues comme « antisémites. » Des exemples qui, avec la menace de convocations disciplinaires en cas de critique de la colonisation et du
génocide, contribuent à un véritable climat d’autocensure. Se confiant au journal étudiant, plusieurs professeurs admettent qu’ils ont supprimé des passages entiers de leurs cours, ou qu’ils
ne se sentent pas à l’aise de discuter l’actualité en cours. Depuis un an donc, la présidence cherche à faire régner la terreur pour empêcher toute contestation, et c’est dans ce climat que
Logan Rozos a pris la parole face à des milliers d’étudiants et d’enseignants. UNE POLITIQUE MACCARTHYSTE QUI S’ALIGNE SUR LE PROJET RÉPRESSIF DE TRUMP Cette utilisation de la censure et de
la répression accrue n’est pas une affaire isolée. À Columbia, ce sont des étudiants qui ont été exclus par dizaines, des départements d’études sur le Moyen-Orient qui ont été mis sous
tutelle du gouvernement, après que Trump a menacé de retirer les subventions de l’Université si elle n’appliquait pas sa politique répressive à la lettre près. Au-delà du mouvement
Palestine, Donald Trump mène une véritable campagne « anti-wokiste » depuis le lancement de sa campagne présidentielle. Ce dernier a ainsi promis de démanteler les programmes pour la
diversité, d’interdire de parler de certains thèmes comme le genre, l’éducation sexuelle, les discriminations ou le climat sur les campus, assumant de vouloir faire de l’université un lieu
de formation au patriotisme, où l’on défend le modèle familial, religieux et traditionnel américain. Parmi tous les outils répressifs saisis par l’administration de Trump, les attaques
envers les étudiants immigrés mobilisés sont un levier offensif central qu’il entend utiliser pour faire taire le mouvement en faveur de la Palestine. Le cas de Mahmoud Khalil, étudiant
palestinien, figure de la mobilisation à Columbia qui s’est fait interpeller à son domicile par les forces de contrôle de l’immigration et qui est aujourd’hui incarcéré en centre de
rétention, menacé de déportation, est un exemple frappant de la brutalité du projet de Trump. D’autres se sont vus retirer leurs diplômes, suspendus de leurs universités et menacés de
déportation pour leurs convictions politiques. Cette répression accrue ne reste pas sans réponse. C’est grâce aux mobilisations par en bas contre la répression que Trump a reculé sur le
retrait de visas de milliers d’étudiants étrangers le 25 avril dernier. L’indignation face à son programme réactionnaire ne cesse d’augmenter et de nombreuses manifestations contre l’extrême
droite ont eu lieu, au reflet du 1er mai qui a rassemblé des milliers de personnes dans la rue avec des mots d’ordre anti-Trump. C’est ce type d’alliances, entre le mouvement étudiant, les
enseignants et les travailleurs mobilisés qui peuvent nous permettre de créer une opposition large au programme réactionnaire de Trump et de le faire reculer sur ses attaques toujours plus
violentes. Les étudiants doivent continuer à s’organiser et à lutter pour la libération de la Palestine et exiger l’abandon de toute poursuite envers les réprimés et la régularisation de
tous les étudiants étrangers menacés !