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Le nouveau Code de justice pénale des mineurs entre en vigueur ce jeudi. Des professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse manifestent contre cette réforme. Ils estiment que le
texte est trop répressif et pas assez éducatif nous dit Mathieu Moreau, secrétaire régional du SNPES-PJJ/FSU FRANCE BLEU BOURGOGNE : L'UN DES OBJECTIFS AFFICHÉS DE CE TEXTE, C'EST
DE JUGER PLUS RAPIDEMENT LES MINEURS. EN CÔTE D'OR ACTUELLEMENT, ON ATTEND COMBIEN DE TEMPS AVANT QU'UN MINEUR SOIT JUGÉ ? MATHIEU MOREAU : C'est variable en fonction de
l'activité des tribunaux, mais on peut aller jusqu'à un an, dix huit mois, parfois deux ans, notamment pour les mesures de probation qui sont parfois très longues, les mesures de
contrôle judiciaire qui peuvent aller d'ailleurs au delà de la majorité. Certains jeunes pouvaient être mis en examen mineurs, mais jugés bien après leur majorité. Le problème,
c'est un problème de moyens. Cette lenteur n'est pas forcément toujours négative parce que pour nous, les éducateurs, il faut prendre le temps. On a besoin de ce temps éducatif
pour rentrer en relation avec les jeunes et les familles. Travailler en confiance, ça ne se fait pas en trois semaines. LE NOUVEAU CODE DE JUSTICE PÉNALE DES MINEURS PRÉVOIT DEUX AUDIENCES
: UNE PREMIÈRE POUR DÉTERMINER SI LE MINEUR EST COUPABLE, UNE DEUXIÈME POUR DÉCIDER DE LA PEINE. AVEC UN DÉLAI ASSEZ COURT ENTRE LES DEUX AUDIENCES. SUR LE PAPIER ÇA SEMBLE QUAND MÊME ÊTRE
UNE BONNE IDÉE NON ? Encore une fois, ça dépend de ce qu'on fait de ce temps éducatif. Cette césure entre les deux audiences, on parle de mise à l'épreuve. Moi, en tant
qu'éducateur, je me questionne sur le contenu de cette mise à l'épreuve. Jusqu'à maintenant, on exerçait des mesures éducatives. Aujourd'hui, on est en train de réduire
le rôle des éducateurs. À vérifier si un jeune respecte bien ses obligations. On est plus dans le contrôle de la probation plutôt que dans l'éducatif. Ça nous inquiète parce que ça
change le cœur de nos missions. QU'EST-CE QUE CA VA CHANGER DANS VOTRE MÉTIER AU QUOTIDIEN ? Jusqu'à présent, on intervenait avant que les jeunes soient déclarés coupables,
c'est à dire qu'on avait l'occasion de travailler avec les jeunes. Il s'agit de faire comprendre à un jeune qu'il y a eu une infraction pénale qui a été commise. Ça
nécessite du temps. Un jeune adolescent qui commet un acte frauduleux, il n'a pas le même discernement, la même maturité qu'un majeur. Ce temps là est perdu puisqu'on va
commencer à rentrer en lien avec les jeunes au moment où ils seront déclarés coupables. Et donc, c'est un temps éducatif qui est oublié. À LIRE AUSSI VOUS ACCOMPAGNEZ COMBIEN DE JEUNES
EN CÔTE-D'OR ? Un éducateur de la PJJ accompagne environ 25 jeunes sur toute l'année. Et nous sommes entre 15 et 20 éducateurs. VOUS ESTIMEZ QU'AVEC CE NOUVEAU CODE DE LA
JUSTICE PÉNALE DES MINEURS LES ADOLESCENTS SERONT JUGÉS COMME DES COMME DES ADULTES. EN QUOI ÇA POSE PROBLÈME ? Si on a créé une justice spécifique pour les mineurs, ce n'est pas pour
rien. Ça part du principe qu'un jeune qui commet une infraction n'a pas le même discernement qu'un adulte. Un jeune n'a pas la même maturité et donc la réponse de la
justice ne doit pas être la même. On doit se poser cette question quand un jeune dans un quartier ou à la campagne comment une infraction : "qu'est ce que ça veut dire sur son
environnement, son parcours, son histoire ?" CETTE RÉFORME A POUR OBJECTIF DE RÉDUIRE LA DÉTENTION PROVISOIRE DES MINEURS. LE TEXTE PEUT CHANGER LES CHOSES EN LA MATIÈRE ? Je ne pense
pas. Sur la question de l'enfermement on a un vrai souci. Nous, on demande des lieux pour accueillir les jeunes qu'on a besoin de placer quand il s'agit de les protéger,
parfois de leur propre famille. Aujourd'hui, ce nombre de structures est réduit à peau de chagrin. On a très peu de solutions, que ce soit sur le plan pénal ou sur celui de la
protection de l'enfance. Et quand on interpelle notre administration là dessus, la seule réponse qu'on a ce sont des structures fermées, des centres fermés.