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Les proches de Margaux Mari, morte étranglée par son compagnon à La Trinité, sont venus dire ce jeudi à la cour et aux jurés combien ce drame était le paroxysme d’un processus d’emprise
_"Mohamed a tué Margaux parce qu’elle était l’objet de son obsession. Quand l’objet ne fonctionne pas comme on veut, on le casse et on le met à la poubelle... comme ma sœur."_
Bertrand est le frère de Margaux. Le président Catherine Bonnici vient de l’inviter d’une voix douce à déposer. Le 2 juin 2017, vers 2 heures du matin, après des années de violences
physiques et psychologiques, Margaux a été étranglée par Mohamed H.. Leurs deux enfants de 5 et 6 ans, ont assisté en partie au crime. Bertrand, 36 ans, attend depuis trois ans et demi ce
procès. Il s’y est préparé malgré un chagrin indicible et livre un récit aussi sobre que poignant du drame qui a anéanti sa famille. _"Tant que Margaux restait sous son emprise, il lui
octroyait le droit de survivre. Quand elle a voulu déployer ses ailes, il l’a tuée. [...] Elle est morte dans l’état de terreur que vous imaginez sans savoir ce qui allait arriver aux
enfants."_ Les pompiers ont découvert la jeune femme la tête enserrée dans un sac-poubelle noué à double tour. Enseignant à l’étranger au moment du meurtre, Bertrand a été contraint de
rentrer en France pour prendre en charge son neveu et sa nièce. Il a sacrifié sa carrière, mis en péril son couple, pour élever _"deux enfants incroyables, très intéressants qui vont
bien."_ "MA FILLE NE CONNAÎTRA JAMAIS SON PAPA HEUREUX" Accroché à la barre, Bertrand raconte avec émotion la rentrée en CP d’Alissa (les prénoms des enfants ont été
modifiés), deux mois après la tragédie: _"C’est le jour où les parents prennent des photos, donnent un dernier bisou. Alissa, cartable sur le dos est assise toute seule à regarder les
autres parents. Elle cherche sa mère du regard. Toute sa vie, si elle est diplômée, si elle se marie, si elle a des enfants..., elle cherchera sa mère du regard." _ La Cour et les jurés
écoutent dans un silence recueilli. Dans le box, l’accusé n’ose croiser le regard de Bertrand Mari qui poursuit avec éloquence: _"Le 1er juin, j’étais le plus heureux du monde, je
faisais le métier de mes rêves, on venait d’avoir notre fille, elle avait six mois. Le 2 juin, au réveil, tout ça s’effondre. Ma sœur est assassinée. Mohamed est en fuite. Mes parents ont
peur... Ma fille ne connaîtra jamais son papa heureux."_ Aujourd’hui, Bertrand élève trois enfants. Il a été désigné comme _"tiers digne de confiance"_ par un juge aux
affaires familiales. Tel un avocat rompu aux plaidoiries, il rappelle que Mohamed Hmaad dispose toujours de l’autorité parentale sur ses deux enfants. _"Est-ce juste que je doive
demander l’autorisation à l’assassin de ma sœur si je peux emmener ses enfants en vacances à l’étranger?"_ Bertrand veut que la cour laisse à Alissa et Ilyes le droit de décider quand
ils voudront voir leur père et non l’inverse. "_QUE RESTE-T-IL POUR UN VIEIL HOMME COMME MOI?"_ Après Bertrand, c’est Paul Mari, 78 ans, ancien maire de Coarraze, qui vient donner
une leçon de vie. Il se définit comme _"un humaniste, citoyen du monde"_. Il ne pourra jamais excuser le crime atroce qui lui a arraché sa fille. Il vient le dire sans haine, sans
éclat de voix: _"Que reste-t-il pour un vieil homme comme moi? Que mes petits enfants puissent aller vers une vie sereine, pleine d’affection et d’amour. Ma famille en a à revendre et
les tantes [les sœurs de l’accusé Ndlr] en ont aussi."_ Deux grands hommes viennent de se succéder à la barre. Dans le box, l’accusé, recroquevillé, plie de plus en plus sous le poids
de son crime. Il sera fixé sur son sort ce vendredi après-midi. UNE FEMME PIÉGÉE Mohamed H. soufflait le chaud et le froid, alternait menaces et mots doux. Des menaces de mort parfois,
lourdes de sens au regard du drame du 2 juin. Plusieurs amies de Margaux ont expliqué, ce jeudi matin, comment la jeune femme avait été piégée. _"Ses enfants toujours impeccables,
étaient sa raison de vivre, elle a tout donné pour eux",_ indique l’une d’elles._ "Elle était sous pression. Sa plus grande peur était qu’il les emmène en Tunisie et qu’elle ne
puisse plus les revoir. C’est pour ça qu’il suffisait qu’il claque des doigts, pour qu’elle les lui amène_", précise une autre. Pendant longtemps, l’enquête démontre qu’elle a enduré
menaces, coups et insultes, y compris quand elle était enceinte, sans oser en parler autour d’elle._ "Elle avait honte. Elle camouflait sa peur derrière un sourire. Pour elle, Mohamed
était un poison. Elle n’arrivait pas à s’en débarrasser."_